Quels sont les facteurs de risque et de protection du burnout scolaire ?

Similitudes et différences des résultats entre les élèves ayant ou non des mesures de soutien

Noémie Lacombe et Myriam Squillaci

Résumé
En Suisse, peu d’études ont mesuré la prévalence du burnout plusieurs années de suite dans une même population, alors qu’il touche environ 10 à 15 % des jeunes selon les études internationales. Cet article présente une recherche dont l’objectif est de documenter la santé des élèves de 11 à 13 ans dans le contexte scolaire au travers de plusieurs temps de mesure. L’article s’intéresse également aux facteurs de risque et de protection du burnout scolaire. Les résultats montrent que les élèves au bénéfice de mesures d’aide ont des moyennes de burnout plus élevées que leurs pairs, au même titre que les élèves qui ont de faibles résultats scolaires ou ceux qui ressentent négativement le climat de classe.

Zusammenfassung
In der Schweiz gibt es nur wenige Studien, welche die Prävalenz von Burnout mehrere Jahre hintereinander in der gleichen Population gemessen haben. Laut internationalen Studien sind jedoch etwa 10 bis 15 Prozent der Jugendlichen davon betroffen. In diesem Artikel wird eine Forschungsarbeit vorgestellt, deren Ziel es war, die Gesundheit von 11- bis 13-Jährigen im schulischen Kontext über mehrere Messzeitpunkte hinweg zu dokumentieren. Der Artikel befasst sich zudem mit den Risiko- und Schutzfaktoren für schulisches Burnout. Die Ergebnisse zeigen, dass die folgenden Gruppen erhöhte Burnout-Durchschnittswerte haben: Schüler:innen mit Fördermassnahmen, mit schwachen schulischen Leistungen oder Jugendliche, die das Klassenklima als negativ wahrnehmen.

Keywords: burnout, santé mentale, élève, facteur de risque, facteur de protection / Burnout, psychische Gesundheit, Schüler, Risikofaktor, Schutzfaktor

DOI: https://doi.org/10.57161/r2025-02-04

Revue Suisse de Pédagogie Spécialisée, Vol. 15, 02/2025

Creative Common BY

Introduction

Le burnout scolaire : prévalence et conséquences

Initialement étudié dans un cadre professionnel, le burnout a progressivement été analysé dans le cadre universitaire, puis au lycée, avant d’être observé chez les élèves de l’école obligatoire. Le burnout scolaire se définit selon les trois mêmes dimensions du modèle validé dans le contexte professionnel (Maslach & Jackson, 1981 ; Salmela-Aro et al., 2009) : l’épuisement émotionnel qui se traduit par une fatigue intense ; le cynisme qui correspond à une attitude détachée à l’égard de l’école ; et le sentiment d’inadéquation qui se manifeste par une perception réduite de l’efficacité personnelle (Lebert-Charron et al., 2021). Le burnout apparait généralement lorsqu’une ou un élève subit un stress scolaire prolongé (Parviainen et al., 2021) créant un déséquilibre entre des exigences scolaires élevées et des ressources personnelles jugées insuffisantes (Demerouti et al., 2001).

La prévalence moyenne du burnout scolaire en Europe se situe entre 10 et 15 % (Lacombe et al., 2023), tandis qu’elle atteint plus de 30 % dans les pays asiatiques (Cheung, 2019). Ce phénomène mérite une attention particulière, car plusieurs recherches ont mis en évidence ses effets importants, notamment sur le décrochage scolaire (Bask & Salmela-Aro, 2012), l’augmentation des symptômes somatiques (Fischer et al., 2016), la détérioration de la qualité du sommeil (Liu et al., 2021), l’apparition de symptômes dépressifs (Fiorilli et al., 2017) ou encore l’augmentation du risque suicidaire (Walburg, 2014).

Le burnout scolaire : facteurs de risque et de protection

Les études ont identifié plusieurs facteurs associés au burnout scolaire. Sur le plan individuel, des facteurs comme l’engagement cognitif (Engels et al., 2019), les performances scolaires (Engels et al., 2019, Virtanen, 2020) – en particulier en mathématiques (Parviainen et al., 2021, Lacombe et al., 2023) –, l’estime de soi (Parviainen et al., 2021) et la confiance en l’avenir (Lacombe et al., 2023) jouent un rôle déterminant. Sur le plan interpersonnel, le soutien des pairs, du personnel enseignant et de la famille est des facteurs qui préservent le bienêtre à l’école (Virtanen et al., 2020, Vansoeterstede et al., 2023). Enfin, au niveau organisationnel, la charge de travail perçue (devoirs, préparation d’évaluations), le climat de classe négatif (Lacombe et al., 2023), les transitions scolaires (Engels et al., 2019, Parviainen et al., 2021) et l’usage excessif d’internet (Salmela-Aro et al., 2017) sont des facteurs contribuant au burnout.

Les dispositifs de soutien

Les enjeux liés à la visibilité des dispositifs de soutien font l’objet de recherches, aussi bien en termes de bénéfices que de risques. Évoquant le co-enseignement, Friend et Cook (2020) relèvent qu’il permet aux élèves de rester en classe ordinaire, et qu’en cela, le dispositif est positif. Ils soulignent aussi que certaines modalités du co-enseignement peuvent, si elles ne sont pas mises en place avec soin, accentuer la perception des difficultés académiques et la stigmatisation sociale des élèves avec des besoins éducatifs particuliers. Les études mentionnent également le rôle du climat de classe et du soutien social dans la prévention du burnout scolaire (Vansoeterstede et al., 2023) : la visibilité des soutiens peut exposer les élèves à une perception accrue de leurs difficultés et impacter leur sentiment de compétence et leur bienêtre (Hornby, 2011). À ce titre, Warnock et al. (2010) et Hornby (2014) plaident pour une « inclusion responsable » (p. 20) qui ne dépend pas uniquement du lieu géographique où l’élève est scolarisé, mais également de l’endroit où il se sent véritablement à sa place. Selon ces autrices et auteurs, cette place peut être aussi bien en classe ordinaire, en classe spéciale ou encore en école spécialisée. Bien que les mesures de soutien soient reconnues pour favoriser la réussite scolaire, leurs effets sur le bienêtre psychologique et social des élèves peuvent dépendre de la modalité de co-enseignement adoptée. En effet, la présence en classe d’une enseignante spécialisée ou d’un enseignant spécialisé peut engendrer un sentiment de stigmatisation chez certaines et certains élèves (Friend & Cook, 2020).

Dans ce contexte, notre étude mesure, sur une période de quatre années consécutives, le burnout scolaire chez des élèves suisses de 8H qui sont âgés de 11 à 13 ans. Comme le premier temps de mesure (2022) a montré que les élèves au bénéfice d’une mesure de soutien présentaient des moyennes de burnout plus élevées, cet article répond aux questions suivantes : Quelle est la prévalence du burnout scolaire entre les élèves avec soutien et ceux sans soutien ? Quels sont les facteurs de risque du burnout scolaire dans l’échantillon ?

Méthode

Procédure et personnes participantes

La recherche a été autorisée par le Département de la formation et des affaires culturelles (DFAC) du canton de Fribourg qui a indiqué les cercles scolaires dans lesquels la recherche peut être conduite. La recherche comporte quatre temps de mesure : mai 2022 (T1), mai 2023 (T2), mai 2024 (T3), et un dernier agendé en mai 2025 (T4).

Les élèves participants ont complété un questionnaire sur des tablettes mises à disposition par l’équipe de recherche en présence de leur enseignante ou de leur enseignant et d’un membre de l’équipe de recherche. Ce dernier a expliqué le but de la recherche, donné les instructions requises, veillé à garantir l’anonymat, la liberté de participation et la possibilité d’interrompre l’étude à tout moment.

La recherche a inclus au total 551 élèves du T1 au T3 : en 2022, 184 élèves (98 garçons et 86 filles) de 8H entre 11 et 13 ans (M = 12.38, SD = 0.48) issus de 10 classes ; en 2023, 190 élèves (98 garçons et 91 filles) de 8H entre 11 et 13 ans (M = 12.00, SD = 0.45) issus de 13 classes ; en 2024, 177 élèves (84 garçons et 93 filles) de 8H entre 10 et 13 ans (M = 11.98, SD = 0.52). Le Tableau 1 montre que les mesures de soutien les plus fréquemment dispensées en 8H sont assurées par les enseignantes spécialisées et les enseignants spécialisés ainsi que les psychologues.

Tableau 1 : Caractéristiques des participants

Caractéristique

T1 (2022)
N
= 184

T2 (2023)
N
= 190

T3 (2024)
N
= 177

Nombres d’élèves par classe

Moins de 17 élèves par classe

43 (23.3 %)

40 (23.6 %)

26 (14.7 %)

Entre 18 et 21 élèves par classe

97 (52.7 %)

73 (38.4 %)

56 (31.6 %)

Entre 22 et 25 élèves par classe

44 (24 %)

72 (27.9 %)

95 (53.7 %)

Redoublement

11 (6 %)

18 (9.5 %)

20 (11.3 %)

Mesure de soutien

Oui (= 30 ; 16.3 %)

Non (= 154)

Oui (= 31 ; 16.3 %)

Non (= 160)

Oui (= 36 ; 20.3 %)

Non (= 138)

Enseignant spécialisé

10

8

16

Psychologue ou pédopsychiatre

7

9

12

Logopédiste

4

7

3

Ergothérapeute, psychomotricien

1

1

0

Double suivi

6

3

4

Autre (FLS, éducateur social)

2

3

1

Note. FLS = Français Langue Seconde (soutien en français) ; T1 = Premier temps de mesure ; T2 = Deuxième temps de mesure ; T3 = Troisième temps de mesure

Outils de mesure

Le questionnaire autoreporté se compose de quatre parties. La partie 1 recueille des informations sociodémographiques, les facteurs de risque personnels (confiance, symptômes somatiques, moyennes en mathématiques et en français) et les soutiens scolaires existants (enseignants spécialisés, psychologie, logopédie, etc.). La partie 2 documente les facteurs interpersonnels, en examinant la perception qu’ont les élèves du soutien reçu de la part de leurs parents, de leurs enseignants et de leurs camarades de classe. La partie 3 mesure le burnout scolaire à l’aide du School Burnout Inventory (SBI) de Salmela-Aro et al. (2009), traduit et validé en français par Meylan et al. (2015). Dans cette étude, l’échelle SBI a obtenu un alpha de Cronbach de 0.89, indiquant une forte cohérence interne. La partie 4 mesure les facteurs de risque interpersonnels et environnementaux à l’aide de l’Échelle des tracas quotidiens, validée en français par Plancherel et al. (1997), qui affiche dans l’étude, un bon niveau de cohérence interne (alpha de Cronbach = 0.89).

Résultats

Différence et similitude entre les élèves ayant ou non des mesures de soutien : prévalence

Tous groupes d’élèves confondus, les résultats indiquent que la proportion d’élèves de 8H en situation de burnout scolaire est de 12.3 % en 2022, de 8.4 % en 2023 et de 12.4 % en 2024. En ce qui concerne le score moyen du burnout, mesuré à l’aide de l’échelle SBI (Meylan et al., 2015), il se situe à 2.32 (SD = 1.04) en 2022, à 2.38 (SD = 1.02) en 2023 et à 2.48 (SD = 1.04) en 2024. Ces scores restent stables au cours des trois ans, les analyses ne révélant aucune différence statistiquement significative. Toutefois, il est à noter que le score moyen du burnout chez les élèves bénéficiant d’un soutien scolaire (enseignant spécialisé, logopédiste, psychologue, psychomotricien) est significativement plus élevé que chez leurs pairs sans soutien (Tableau 2).

Tableau 2 : Moyennes de burnout dans les deux groupes d’élèves

2022
M (SD)

2023
M (SD)

2024
M (SD)

Avec au moins une mesure de soutien

= 30
2.97 (1.02)***

n = 31
2.83 (1.15)*

n = 36
2.91 (0.98)**

Sans mesure de soutien

= 154
2.20 (1.00)***

n = 159
2.29 (0.97)*

n = 141
2.38 (2.38)**

Note. n = nombre d’élèves ; M = Moyenne de burnout ; SD = écart type ; * = différence significative p < .05 ; ** = différence significative p < .01 ; *** = différence significative p < .001

La Figure 1 montre que la proportion d’élèves en burnout est plus élevée parmi ceux qui bénéficient d’au moins une mesure de soutien que parmi ceux qui n’en bénéficient d’aucunes.

Figure 1 : Prévalence du burnout dans les deux groupes d’élèves
Prévalence du burnout 2022 : 10% pour les élèves sans mesure de soutien; 20% pour les élèves avec mesure de soutien.
Prévalence du burnout 2023 : 7% pour les élèves sans mesure de soutien; 16% pour les élèves avec mesure de soutien.
Prévalence du burnout 2024 : 10% pour les élèves sans mesure de soutien; 22% pour les élèves avec mesure de soutien.

La comparaison selon les différents types de soutien (Tableau 3) montre que, sur l’ensemble des trois années étudiées, les élèves bénéficiant d’un soutien dispensé par une enseignante spécialisée ou un enseignant spécialisé présentent un taux de burnout scolaire plus élevé que leurs pairs sans soutien. Pour les élèves bénéficiant d’un soutien psychologique, les différences de moyennes sont significatives en 2022, mais ne le sont plus en 2023 et en 2024. Quant aux élèves bénéficiant d’un soutien logopédique, aucune différence significative n’a été observée par rapport au groupe sans soutien.

Tableau 3 : Différence de moyenne du burnout des élèves suivis ou non par un ou un professionnel de la pédagogie spécialisée

Mesures de pédagogie spécialisée

2022 M (SD)

2023 M (SD)

2024 M(SD)

Avec suivi en enseignement spécialisé

2.85 (0.56)*

3.10 (1.22)*

3.08 (0.82)*

Sans suivi en enseignement spécialisé

2.30 (1.06)*

2.34 (0.99)*

2.42 (1.04)*

Avec suivi en psychologie

3.35 (1.23)***

2.78 (1.18) ns

2.70 (0.95) ns

Sans suivi en psychologie

2.26 (1.06)***

2.36 (1.01) ns

2.47 (1.05) ns

Avec suivi en logopédie

2.83 (0.77) ns

2.50 (0.83) ns

2.52 (1.39) ns

Sans suivi en logopédie

2.30 (1.05) ns

2.38 (1.03) ns

2.48 (1.03) ns

Note. M = Score moyen de burnout ; SD = écart type ; * = différence significative p < .05 ; ** = différence significative p < .01 ; *** = différence significative p < .001 ; ns = différence non significative

Facteurs de risque : différence et similitude entre les élèves avec ou sans mesures de soutien

Les résultats des analyses statistiques (Tableau 4) montrent que certains facteurs sont davantage rapportés par les élèves bénéficiant d’une mesure de soutien par rapport à ceux sans soutien. Parmi les facteurs individuels figurent la fatigue et les difficultés de sommeil, des résultats scolaires plus faibles en mathématiques et en français, des sentiments de peur et d’angoisse. Les élèves bénéficiant d’une mesure de soutien rapportent aussi davantage de symptômes somatiques comme des douleurs au ventre, au dos et des maux de tête. Au niveau interpersonnel, les élèves bénéficiant d’une mesure de soutien indiquent plus souvent se sentir seuls, manquer d’amis, et subir davantage de moqueries, de menaces ou d’intimidations de la part de pairs comparativement aux élèves sans soutien. Enfin, lorsqu’on demande aux élèves s’ils se plaisent dans leur classe, en moyenne sur les trois années, seuls 9 % des élèves sans soutien répondent négativement, tandis que cette proposition atteint 24 % chez les élèves bénéficiant d’un soutien, soit près d’un quart de l’échantillon.

Tableau 4 : Facteurs de risque

Les élèves avec une mesure de soutien rapportent davantage

2022

2023

2024

Variables individuelles

Manquer souvent d’énergie

augmentation ***

*

ns

Avoir des douleurs au ventre, au dos, à la tête

augmentation *

ns

augmentation *

Se sentir fatigué

augmentation *

augmentation *

augmentation *

Ressentir de la peur ou de l’angoisse

augmentation *

augmentation *

ns

Avoir des difficultés à dormir, se réveiller souvent la nuit

ns

augmentation *

augmentation *

Avoir de moins bons résultats en math et français

augmentation ***

augmentation *

augmentation **

Recevoir des mauvaises notes

augmentation ***

ns

augmentation *

Se faire du souci pour son avenir (scolaire-professionnel)

augmentation **

augmentation*

ns

Variables interpersonnelles

Être l’objet de menace ou d’intimidation

augmentation **

augmentation *

augmentation *

Être souvent seul

augmentation *

augmentation ***

augmentation *

Ne pas avoir assez d’amis

augmentation *

augmentation *

augmentation *

Avoir moins de soutien des camarades

augmentation ***

augmentation *

ns

Être l’objet de moquerie

augmentation *

augmentation **

augmentation *

Ne pas être dans le groupe dont ils aimeraient faire partie

ns

ns

augmentation *

Avoir des disputes avec ses camarades

ns

augmentation ***

augmentation ***

Variables organisationnelles

Avoir trop d’évaluations à préparer

augmentation ***

ns

ns

Avoir trop de devoirs à faire

augmentation *

ns

augmentation *

Être dérangé par du bruit à l’école

augmentation *

ns

ns

Note. ns = différence non significative ; * = différence significative p < .05 ; ** = différence significative p < .01 ; *** = différence significative p < .001 

Discussion – Conclusion

Les résultats montrent que les élèves bénéficiant de mesures de soutien présentent des scores moyens de burnout significativement plus élevés que ceux qui n’en bénéficient pas. Ils rapportent davantage de troubles somatiques et de sentiments de solitude et perçoivent le climat de leur classe de façon plus négative. Ces élèves expriment une moindre intégration sociale, confirmant ainsi l’impact des relations interpersonnelles sur la santé des élèves (Virtanen et al., 2020 ; Vansoeterstede et al., 2023). Plusieurs hypothèses explicatives peuvent être envisagées à ce propos.

  1. Il est possible que les élèves ayant des difficultés scolaires soient davantage épuisés (Engels et al., 2019) et que, sans soutien, ils le soient encore plus. Dans ce sens, les élèves seraient davantage en burnout en raison de leurs difficultés scolaires et les mesures de soutien reçues seraient une réponse à leurs difficultés et à l’épuisement associé.
  2. Une autre hypothèse porte sur le climat de classe et le sentiment d’appartenance sociale : un quart des élèves bénéficiant d’un soutien disent ne pas se plaire dans leur classe. Ces données sont corroborées par d’autres recherches qui relèvent une moins grande popularité des élèves intégrés que leurs pairs, un moins grand nombre d’amis, une estime de soi plus faible et un sentiment de rejet social accru (Pijl et al., 2008 ;
    Pijl & Frostad, 2010). Dans cette perspective, la Loi sur la pédagogie spécialisée insiste sur l’importance de réaliser l’inclusion dans « le respect du bienêtre et des possibilités de développement de l’enfant » (LPS, 2017, Art. 3, al. b). Il est donc possible que différents types d’environnements scolaires puissent répondre aux besoins spécifiques et au bienêtre de l’enfant. Parmi eux figurent l’inclusion dans une classe ordinaire, une classe spécialisée au sein d’une école ordinaire ou encore dans une école spécialisée (Hornby, 2014).
  3. Une troisième hypothèse peut être liée aux théories qui associent le burnout scolaire à une détérioration des interactions sociales et à une perception négative du contexte scolaire (Salmela-Aro, 2008). Les élèves en burnout percevraient leur environnement scolaire de manière plus négative, ce qui pourrait renforcer leur malêtre et aggraver leurs difficultés relationnelles.
  4. L’étude montre également que les élèves soutenus par une personne professionnelle de l’enseignement spécialisé présentent des scores moyens de burnout plus élevés que ceux qui n’ont pas de suivi ou qui sont suivis par un ou une psychologue ou un ou une logopédiste. Plusieurs hypothèses peuvent expliquer ces différences, notamment le fait que les élèves bénéficiant d’une aide pédagogique spécialisée rencontrent des difficultés scolaires plus importantes. Une autre explication pourrait être liée au degré de visibilité de l’intervention pédagogique : l’accompagnement en classe par une enseignante spécialisée ou un enseignant spécialisé peut être associé à un effet de stigmatisation (Friend & Cook, 2020). Dans ce contexte, il serait pertinent d’approfondir, par des recherches complémentaires, la question des conséquences des différentes modalités de co-enseignement sur la dynamique du burnout scolaire. Cela permettrait d’élargir la réflexion quant à l’organisation de ces dispositifs et à leur impact psychosocial. Toutefois en raison de la taille restreinte de l’échantillon concerné par des mesures de soutien, des études complémentaires, conduites de manière longitudinale, sur des cohortes étendues plus représentatives sont nécessaires pour confirmer ces résultats.

Cette étude invite donc à réfléchir à la manière dont les mesures d’aide sont mises en œuvre auprès des élèves, tout en insistant sur l’importance de conditions d’accompagnement pédagogique adaptées aux besoins de chaque élève (Ebersold, 2020 ; Di Grassi, 2022). Dans cette optique, il serait intéressant d’explorer les effets d’autres mesures de soutien, comme les modèles de soutien à paliers multiples (de Chambrier & Dierendonck, 2022 ; Fuchs & Fuchs, 2011) ou encore une pédagogie plus universelle, potentiellement moins stigmatisante pour les élèves intégrés, afin de favoriser un environnement scolaire qui préserve au mieux la santé perçue et le bienêtre de chaque élève.

Autrices

Noémie Lacombe
Lectrice

Département de pédagogie spécialisée Université de Fribourg

noemie.lacombe@unifr.ch

Myriam Squillaci
Professeure ordinaire

Département de pédagogie spécialisée Université de Fribourg

myriam.squillaci@unifr.ch

Références

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