Les caractéristiques des enfants des classes régionales de la pédagogie spécialisée lors d’une activité collaborative

Marion Duret et Isabelle Carchon

Résumé
En Suisse, les classes régionales de pédagogie spécialisée (CRPS) visent une intégration des enfants en milieu ordinaire. Cette étude exploratoire comparative étudie les compétences en communication non verbale et en coopération motrice chez les enfants de CRPS par rapport aux enfants de classes ordinaires, lors d’un jeu de construction. Les résultats montrent que les enfants de CRPS auraient une communication non verbale plus désorganisée et une coopération motrice moins efficiente. Pour favoriser la future intégration sociale des enfants de CRPS, il serait intéressant de stimuler les compétences nécessaires lors de tâches collaboratives.

Zusammenfassung
In der Schweiz zielen Sonderklassen in Regelschulen (les classes régionales de pédagogie spécialisée [CRPS]) darauf ab, Kinder in die Regelschule zu integrieren. Eine explorative Vergleichsstudie untersucht, inwiefern sich die nonverbalen Kommunikationsfähigkeiten und die motorische Kooperation während eines Konstruktionsspiels bei Kindern in Sonderklassen und Kindern in Regelklassen unterscheiden. Die Ergebnisse zeigen, dass bei Kindern aus Sonderklassen die nonverbale Kommunikation unorganisierter und die motorische Kooperation weniger effizient sind. Um Kinder aus Sonderklassen stärker sozial zu integrieren, wäre es wichtig, genau diese Fähigkeiten – Zusammenarbeit und nonverbale Kommunikation – gezielt zu fördern.

Keywords: communication non verbale, coopération motrice, élèves à besoins particuliers, intégration sociale /

motorische Kooperation, nichtverbale Kommunikation, Schüler mit besonderen Bedürfnissen, soziale Integration

DOI: https://doi.org/10.57161/r2025-02-03

Revue Suisse de Pédagogie Spécialisée, Vol. 15, 02/2025

Creative Common BY

Introduction

La santé mentale peut se définir par un état de bienêtre mental qui permet notamment de déployer ses potentialités développementales, d’apprendre de manière plus optimale, de gérer les différentes situations stressantes de la vie ou encore de participer à la vie sociale. La relation inverse est également vraie, des relations sociales positives font partie des facteurs de protection de la santé mentale (Organisation mondiale de la santé [OMS], 2022). Il semble donc important de développer les compétences sociales à des fins préventives.

Cette étude exploratoire vise à attester de l’existence et de la nature des différences de comportements psychomoteurs sociaux chez les enfants des classes régionales de pédagogie spécialisée (CRPS) par rapport à des enfants scolarisés en classes ordinaires en se centrant sur la coopération motrice et la communication non verbale. La coopération motrice se définit comme la coordination d’actions motrices entre au moins deux personnes en vue d’un objectif commun, comportement adaptatif qui se retrouve fréquemment à l’école (Chaminade et al., 2012). En effet, les enfants apprennent généralement à anticiper ce que leur pair va faire et à ajuster leurs actions dans une coordination temporelle précise (Vesper et al., 2010). D’après Bratman (2014), lors de ces activités coopératives partagées, les enfants doivent s’engager à la réalisation d’activités conjointes et se soutenir mutuellement. Cet enchevêtrement des planifications entre les personnes est un élément clé de l’intentionnalité conjointe et partagée. Lors d’une activité de coopération motrice, les partenaires peuvent signaler des attitudes coopératives par des gestes, des regards, des expressions faciales, la distance spatiale et les postures ; autant d’éléments constitutifs de la communication non verbale (Aguirre & Guimon Ugatechea, 1994 ; De Ajuriaguerra, 1953 ; Török et al., 2019).

En Suisse, les enfants ayant des mesures de pédagogie spécialisée sont considérés comme ayant des besoins éducatifs particuliers. Pour l’année scolaire 2023-2024, ils représentaient 4 % des enfants scolarisés (Lanners, 2025). Ces enfants à besoins éducatifs particuliers constituent un groupe hétérogène ayant systématiquement des écarts à la norme (Noël, 2020). De multiples facteurs, scolaires, médicaux, socioéconomiques, familiaux et culturels influencent le développement de ces enfants (APA, 2023 ; Frandji & Rochex, 2011). De plus, ces enfants avec des particularités développementales montrent des variations dans la communication non verbale pouvant entrainer des difficultés relationnelles avec les pairs et des symptomatologies dépressives (Chebli et al., 2016 ; Piek et al., 2007). Ces troubles sont donc des facteurs de vulnérabilité à une bonne santé mentale.

Dans le Canton de Vaud, les CRPS sont une proposition intensive de mesures renforcées de pédagogie spécialisée en milieu ordinaire dont la priorité est l’intégration en milieu scolaire ordinaire après deux à quatre ans. Les enfants de ces classes ont un potentiel développemental préservé (Canton de Vaud, 2019, 2023). Nos observations subjectives laissent à penser que les enfants en CRPS présenteraient des troubles psychomoteurs pouvant s’exprimer par des gestes, des postures, des regards inappropriés et des actions sans rapport avec l’activité commune.

Méthodologie

Participants

Douze enfants de CRPS, 1 fille et 11 garçons, âge moyen de 9 ans et 6 mois (ET = 10 mois) et 12 enfants de classes ordinaires, 4 filles et 8 garçons, âge moyen de 9 ans (ET = 5 mois) ont été recrutés. L’ensemble des enfants suivaient un cursus scolaire de 4-5 Harmos. Les parents et chaque enfant ont signé un consentement éclairé. La fiche de consentement était accompagnée d’une fiche d’explication globale de la situation de recherche et de la durée pendant laquelle les enfants seraient hors de leur classe. Les coordonnées professionnelles de la première autrice ont été transmises sur les deux documents pour toutes informations complémentaires et pour pouvoir obtenir leur consentement durant l’ensemble de la recherche.

Procédure 

La tâche coopératrice consistait à construire un château par binôme, en silence, à l’aide de briques en carton (120) disposées dans une salle de classe vide. Les enfants disposaient de 10 minutes pour effectuer la construction et chaque passation avait été filmée.

Analyse des données

La méthode d’observation systématique ayant été retenue, une grille d’observation a été créée avec deux catégories : la communication non verbale et la coopération motrice. Chaque catégorie est elle-même divisée en sous-catégories. Ainsi, dans la catégorie communication non verbale, nous nous sommes inspirées de la définition de DeVito (2002) où nous retrouvons les sous-catégories des regards, des mimiques faciales, des postures et des gestes orientés vers l’autre.

Dans la catégorie de coopération motrice (en accord avec Bratman, 2014 ; Chaminade et al., 2012 ; Vesper et al., 2010), les actions conjointes sont ajustées à la partenaire ou au partenaire dans une temporalité précise, c’est pourquoi nous avons créé deux sous-catégories : gestes synchrones et gestes isolés. Les gestes synchrones peuvent être réalisés de façon complémentaire ou identique (réelles imitations) et sont révélateurs d’une coopération motrice. À l’inverse, les gestes isolés, en lien ou non avec la construction, sont révélateurs d’une non-coopération motrice.

Chaque sous-catégorie se caractérise par différentes unités comportementales pour permettre de donner un descriptif exhaustif des comportements à coder.

Communication non verbale

Les regards :

Les mimiques faciales :

Les postures :

Les gestes orientés vers le partenaire :

Coopération motrice

Les gestes synchrones identiques et complémentaires :

Les gestes isolés (liés à la construction ou sans lien avec la construction) :

L’analyse des vidéos a été effectuée au moyen de cette grille d’observation pour chaque enfant du binôme et pour chaque unité comportementale. Le pas d’échantillonnage était de 10 secondes afin de coder chaque unité de comportement une par une, en durée. Les unités comportementales de chaque sous-catégorie sont exclusives, c’est-à-dire ne peuvent pas avoir lieu en même temps. En amont un coefficient de fidélité intercodeur a été effectué par les deux autrices, il est de 0.93. Ensuite, les vidéos ont été codées par la première autrice.

Finitude de la construction

Une photo de chaque construction a été prise à la fin des 10 minutes. Le nombre de briques au sol non positionnées a été compté. Nous avons considéré que si l’ensemble des briques (120 briques) est utilisé, alors la finition de la construction est de 100 %. Par exemple, l’utilisation de 90 briques est considérée comme une finition de 75 %.

Résultats

Les durées totales puis les durées moyennes ont été calculées pour chaque unité comportementale de la grille d’observation. Les analyses de la normalité ont été vérifiées (test de Shapiro-Wilk) et les analyses statistiques ont été menées soit avec la Loi de Student (t) soit avec le test de Mann-Withney (U) pour échantillons indépendants.

Communication non verbale : durées de la direction des regards

Comme présentées dans le Tableau 1, les durées des regards vers la ou le partenaire et les durées des regards vers ailleurs sont significativement plus élevées chez les enfants en CRPS en comparaison aux enfants en classe ordinaire. Les durées des regards en direction de la construction sont significativement moins élevées chez les enfants en CRPS en comparaison aux enfants en classe ordinaire.

Tableau 1 : Moyennes et écart-types des durées des directions des regards (en secondes) pour les deux groupes d’enfants CRPS / Ordinaires

Directions des regards

Population

Moyenne

Écart-type

Valeur du p

Regarde son partenaire

CRPS

127.33

33.15

(22) = 2.88 ; = 0.009

Classe ordinaire

88.67

32.43

Regarde en direction
de la construction

CRPS

323.25

36.03

(22) = -3.73 ; < 0.001

Classe ordinaire

373.91

30.33

Regards vers ailleurs

CRPS

28.83

15.33

(22) = 3.65 ; < 0.001

Classe ordinaire

11.67

5.47

Communication non verbale : durées des mimiques faciales

Comme présentées dans le Tableau 2, les durées des mimiques faciales positives sont significativement plus élevées chez les enfants en CRPS en comparaison aux enfants de classe ordinaire.

Les durées des mimiques faciales négatives, d’étonnement-surprise ou de visage neutre ne sont pas significativement différentes entre les deux groupes.

Tableau 2 : Moyennes et écart-types des durées des mimiques faciales positives (en secondes) pour les deux groupes d’enfants CRPS / Ordinaires

Mimiques faciales

Population

Moyenne

Écart-type

Valeur du p

Positives (sourires, rire…)

CRPS

111.25

93.42

U = 112.0 ; = 0.023

Classe ordinaire

44.08

43.31

Communication non verbale : durées des postures

Comme présentées dans le Tableau 3, les durées de la direction du corps vers le camarade et les durées de la direction du corps vers ailleurs sont significativement plus élevées pour les enfants en CRPS en comparaison des enfants en classe ordinaire. Les durées de la direction du corps vers le matériel sont significativement moins élevées pour les enfants en CRPS en comparaison des enfants en classe ordinaire.

Tableau 3 : Moyennes et écart-types des durées des postures (en secondes) pour les deux groupes d’enfants CRPS / Ordinaires

Postures

Population

Moyenne

Écart-type

Résultat

Corps dirigé vers le camarade

CRPS

100.92

30.11

U = 112.5 ; p = 0.021

Classe ordinaire

69.91

26.74

Corps dirigé vers le matériel

CRPS

330.17

38.30

U = 19 ; = 0.001

Classe ordinaire

381.08

28.51

Corps dirigé vers ailleurs

CRPS

48

28.57

U = 116 ; = 0.012

Classe ordinaire

22.41

11.22

Communication non verbale : durées des gestes orientés vers le partenaire

Comme présentées dans le Tableau 4, les durées des gestes de « montrer le matériel ou l’emplacement ou le partenaire » sont significativement plus élevées pour les enfants de CRPS en comparaison aux enfants de classe ordinaire.

Les durées des gestes de « mimer avec ses mains et/ou son corps une action » ou de « toucher son ou sa partenaire » ne sont pas significativement différentes entre les deux populations.

Tableau 4 : Moyennes et écart-types des durées des gestes orientés vers le partenaire (en secondes) pour les deux groupes d’enfants CRPS / Ordinaires

Gestes orientés vers le partenaire

Population

Moyenne

Écart-type

Valeur du p

Montre le matériel ou
l’emplacement ou le partenaire

CRPS

9.33

9.58

U = 112.5 ; p = 0.021

Classe ordinaire

2

3.38

Coopération motrice : durées des gestes synchrones complémentaires et identiques

Comme présentées dans le Tableau 5, les durées des gestes synchrones complémentaires de « prendre/porter/tenir/donner la brique pour l’autre » sont significativement plus élevées pour les enfants de CRPS en comparaison des enfants de classe ordinaire. Les durées des gestes synchrones identiques de « prendre/porter/poser la brique en même temps que son/sa partenaire ou avec un décalage maximum de 3 secondes » sont significativement moins élevées chez les enfants de CRPS en comparaison des enfants de classe ordinaire.

Les durées de gestes synchrones complémentaires de « se déplace pour que l’autre fasse une action » ne sont pas significativement différentes entre les deux populations.

Tableau 5 : Moyennes et écart-types des durées des gestes synchrones complémentaires et identiques (en secondes) pour les deux groupes d’enfants CRPS/ Ordinaires

Gestes synchrones complémentaires et identiques

Population

Moyenne

Écart-type

Valeur du p

Prend, porte, tient, pose,
donne la brique pour l’autre

CRPS

33.25

45.79

U = 123.5 ; = 0.003

Classe ordinaire

5.92

6.77

Prend, porte, pose la brique
en même temps que son / sa
partenaire ou avec un décalage de 3 secondes

CRPS

165,08

68,07

(22) = -2.73 ; = 0.012

Classe ordinaire

236,75

60,14

Coopération motrice : durées des gestes isolés avec ou sans lien avec la construction

Comme présentées dans le Tableau 6, les durées de gestes isolés sans lien avec la construction de « toucher le matériel sans lien avec la construction » et de « bouger son corps sans lien avec la construction » sont significativement plus élevées chez les enfants de CRPS en comparaison des enfants en classe ordinaire. Les durées des gestes isolés sans lien avec la construction de « montrer le sol ou le matériel pour soi » ne sont pas significativement différentes entre les deux populations.

Les durées des gestes isolés en lien avec l’action de « prendre ou porter ou poser la brique sans prise en compte de l’autre » ne sont pas significativement différentes entre les deux populations.

Tableau 6 : Moyennes et écart-types des durées des gestes isolés (en secondes) pour les deux groupes d’enfants CRPS / Ordinaires

Gestes isolés

Population

Moyenne

Écart-type

Valeur du p

Touche le matériel sans lien
avec la construction

CRPS

15.33

20.38

U = 127 ; = 0.001

Classe ordinaire

0.83

2.89

Bouge son corps sans lien
avec la construction

CRPS

25.17

34.89

U = 136.5 ; = 0.001

Classe ordinaire

0.75

1.60

Finitude de la construction

Après 10 minutes d’expérimentation, l’évaluation de la finitude de la construction a été calculée à partir du nombre de briques utilisées, comme indiqué précédemment. L’ensemble des binômes des classes ordinaires ont utilisé la totalité des briques (100 %) pour la construction de leur château. Pour les binômes de CRPS, seulement un seul binôme a utilisé l’ensemble des briques (100 %), trois binômes ont terminé avec 90 briques utilisées (75 %) et deux binômes ont terminé avec 60 briques utilisées (50 %).

Discussion

Les objectifs de cette étude étaient de comparer, au sein d’une activité de construction, la communication non verbale et la coopération motrice d’enfants de CRPS par rapport à des enfants de classes ordinaires.

La communication non verbale a été étudiée au travers des sous-catégories de comportements : les regards, les mimiques faciales, les postures et les gestes en direction ou non de la partenaire ou du partenaire. Chez les enfants en CRPS, les durées des indices dirigés vers la ou le partenaire comme des regards, des postures et des gestes ainsi que des mimiques faciales positives sont plus importantes. Ces enfants en CRPS sont donc davantage orientés vers la ou le partenaire en comparaison aux enfants de classes ordinaires. Cependant, les durées des regards et des postures orientées vers ailleurs sont également plus importantes chez les enfants de CRPS ce qui souligne que leur communication non verbale serait plus désorganisée. Ces durées importantes dans les indices de communication non verbale dirigés vers la ou le partenaire et aussi dirigés vers ailleurs peuvent être interprétées comme des difficultés d’inhibition sensorimotrice. Cette interprétation est en accord avec Houdé (2010), selon laquelle le développement de l’inhibition permettrait de sortir du stade prédominé par l’activation sensorimotrice.

La coopération motrice a été envisagée au travers des sous-catégories comme les gestes synchrones complémentaires et identiques ainsi que les gestes isolés avec ou sans lien avec la construction. Lors de la planification d’une coopération motrice, pour se répartir les tâches et sous-tâches, les participantes et les participants « calculent » implicitement le cout global de l’activité afin d’augmenter l’efficacité commune (Török et al., 2021). Nous pouvons remarquer que ce « calcul » a plus ou moins échoué chez les enfants de CRPS puisqu’ils n’ont majoritairement pas fini leur construction.
À l’inverse, les enfants de classe ordinaire ont effectué plus d’actions synchrones identiques, ce qui leur a permis de finir systématiquement leur construction. La planification des enfants de CRPS semble moins efficace. Le fait qu’ils n’aient pas terminé leurs châteaux dans le temps imparti en comparaison aux enfants de classes ordinaires pourrait aussi montrer que la perception des durées par ces enfants est moins efficiente (Puyjarinet et al., Bella, 2017). La synchronie temporelle (faire en même temps la même chose) semblerait déficiente chez ces enfants (Girardot et al., 2009 ; Uzgiris, 1981).

Par ailleurs, la coopération motrice des enfants de CRPS apparait discontinue : des actions synchrones complémentaires pour la ou le partenaire ont été réalisées sur des durées courtes, mais les durées des gestes isolés sans lien avec la construction ont été importantes. Ces gestes soulignent que les enfants de CRPS n’avaient pas de représentation claire de l’objectif commun et que leurs rôles respectifs n’étaient probablement pas bien compris. Ces enfants n’ayant pas la représentation d’un objectif partagé se confondent dans leur propre tâche et celle d’autrui (Milward & Sebanz, 2018).

En plus d’un défaut de représentation commune, les durées importantes de gestes isolés sans lien avec la construction montrent que les enfants de CRPS prennent moins en compte les actions de leur partenaire de jeu et ne s’ajustent pas toujours dans leur comportement. Ils sont moins engagés à aider leur partenaire ou à réaliser l’action conjointe, ce qui peut provoquer la perte de l’intentionnalité conjointe et partagée (Bratman, 2014). Étant donné que ces mécanismes sont très présents dans nos sociétés coopératives (Tomasello, 2014), un tel manque d’intention conjointe partagée dans l’activité commune chez les enfants de CRPS provoquerait des difficultés sociales dans un système collaboratif. En effet, un enfant adapté dans son environnement social doit pouvoir fournir des réponses appropriées face à sa ou son camarade (Soppelsa & Albaret, 2011). Les durées importantes de gestes isolés sans lien avec la construction correspondent à des réponses inappropriées dans un contexte de coopération. Ces comportements des enfants en CRPS amèneraient des difficultés sociales avec les enfants de classes ordinaires lors de leur intégration.

Ainsi, l’utilisation du terme de « coopération psychomotrice » permettrait d’englober les indices de la communication non verbale et ceux de la coopération motrice, et leurs liens dans les interactions sociales.

Proposer en séances des tâches collaboratives à des enfants à besoins spécifiques devrait leur permettre de mieux organiser leur communication non verbale, d’améliorer leur planification et leur représentation de l’objectif commun afin de renforcer leurs compétences sociales pour une meilleure intégration en classe ordinaire (Soares & Serrano, 2014). Pour Guralnick (2010), les compétences interpersonnelles avec les pairs développées durant l’enfance sont directement associées à la qualité de la santé mentale à l’âge adulte (indépendance, autodétermination et inclusion).

Autrices

Marion Duret
Psychomotricienne MIP (Master
International de Psychomotricité)

Service de Psychologie Scolaire
Lausanne

marion.duret@psychomotricien.eu

Isabelle Carchon
Docteure en psychologie cognitive

École Pratique des Hautes Études Paris

isabelle.carchon@ephe.psl.eu

isabelle.carchon@polesante.eu

Références

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