La santé mentale des jeunes

Ce n’est pas banal !

Robin Morand

DOI: https://doi.org/10.57161/r2025-02-00

Revue Suisse de Pédagogie Spécialisée, Vol. 15, 02/2025

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Les dernières décennies ont vu émerger une prise de conscience croissante de l’importance de la santé mentale. La récente pandémie de la COVID-19 semble avoir agi comme un révélateur brutal des fragilités déjà latentes. Bien que cette période ait sans doute causé de nombreuses souffrances psychiques, elle a aussi exacerbé les tensions ressenties face aux nombreux événements stressants auxquels nous sommes individuellement et collectivement confrontés.

Mais qu’entend-on exactement par « santé mentale » ? L’Organisation mondiale de la santé (OMS) la définit non pas comme une simple absence de trouble, mais comme un état de bienêtre dans lequel la personne peut se réaliser, faire face aux événements stressants rencontrés, apprendre et travailler ou encore contribuer à sa communauté. Ces derniers points illustrent l’importance de la santé mentale : elle est essentielle à notre bon fonctionnement.

Dans l'imaginaire collectif, on tend à minimiser ces thématiques et surtout leur ampleur. Peut-être que l'emplacement des hôpitaux psychiatrique et autres institutions – bien souvent en dehors des villes – nous aide à les tenir à distance et ainsi à ne pas nous sentir concernés. Mais les chiffres sont là : en Suisse et au Liechtenstein, près d’un tiers des adolescentes et adolescents âgés de 14 à 19 ans sont concernés par des troubles de santé mentale. Autrement dit, dans un groupe de 24 jeunes, huit sont concernés. Sur ces huit jeunes, moins de quatre seront « détectés » et auront le courage ou encore la possibilité de consulter une professionnelle ou un professionnel (Barrense-Dias et al., 2021).

La santé mentale ne saurait être réduite à une affaire individuelle ou médicale. Elle est profondément liée à l’environnement de formation, professionnel, familial et social. Parent depuis peu, j’ai été effaré par le manque d’empathie et de compréhension des fragilités et besoins propres à cette période, avec des remarques que j’ai entendues ou qui m’ont été rapportées du type : « Vous avez de la chance, c’est facile maintenant », « Tu vas prendre encore longtemps ces pauses pour tirer ton lait ? » ou encore « À mon époque on n’y avait pas le droit et on arrivait très bien sans ». (p.ex., congé paternité, droits particuliers pour les femmes allaitantes). Certes les conditions sont différentes aujourd’hui qu’il y a 10 ou 40 ans, mais cela n’abolit pas les difficultés auxquelles une personne – ou un groupe de personnes – peut être confrontée à un moment de sa vie, encore moins ses ressentis par rapport à la situation en question.

Je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec ce que certaines et certains jeunes doivent entendre quotidiennement… N’avez-vous jamais entendu une ou un proche les juger, les critiquer – ou peut-être l’avez-vous fait vous-mêmes ? « Les jeunes sont trop fragiles maintenant », « Les ados ne savent plus rien faire », « La génération Z est comme ça ». Au lieu de se fonder sur des stéréotypes générationnels qui ne sont absolument pas prouvés (Costanza et al., 2023), j’invite chacune et chacun à abandonner ses aprioris et à essayer de se mettre un instant à la place de l’autre, d’accepter que chacune et chacun gère et répond aux stress de la vie de manière différente et que probablement l’une des meilleures choses constructives que l’on puisse faire est de se soutenir et essayer de se comprendre mutuellement.

Après avoir défini la thématique et le cadre, ce numéro aborde la santé mentale des jeunes à travers plusieurs regards et à différentes étapes de la vie, allant de l’école obligatoire jusqu’à la formation professionnelle.

Robin Morand

Collaborateur scientifique
SZH/CSPS
robin.morand@csps.ch